MAGAZINE – Femmes dans l’agriculture : Karin Vander Perre et Tine Magnus

L’entreprise productrice de chicons de la famille Magnus est bien connue dans la petite commune de Brussegem, au Brabant Flamand. Elle fut fondée en 1987 par Johan Magnus qui commença la culture de chicons d’abord en pleine terre avant de faire le pas vers l’hydroculture. Très vite, son épouse Karin Vander Perre rejoignit l’entreprise. Aujourd’hui, leurs enfants Tine et Sam travaillent également à l’entreprise alors que Lotte poursuit son rêve en Irelande. Conversation avec les deux femmes fortes de l’entreprise : Karin et Tine.

Hectares : Karin, pourquoi la décision de te joindre à l’entreprise ?
Karin: Par amour ! (rires) Je suis moi-même née dans une famille d’agriculteurs qui a toujours eu des vaches. D’ailleurs, tous les cinq enfants sont devenus eux-mêmes agriculteurs et douze des quinze petits-enfants également ! Je n’avais cependant pas pensé faire métier dans l’agriculture après mes études. Au moment de rencontrer Johan, je travaillais comme technicienne de laboratoire chez Coca-Cola. Le métier de Johan étant ce qu’il était, je lui prétais main-forte après mes heures. Au début, je combinais cela avec mon travail. J’ai longtemps pu combiner le travail à l’entreprise et mon job chez Coca-Cola. Avec l’évolution de l’entreprise, la charge de travail devenait cependant trop lourde pour Johan. Je l’ai donc rejoint dans l’entreprise autour de la naissance de Tine.

Saviez-vous comment notre entreprise est née, d’ailleurs ? Quand Johan était encore étudiant, il s’est fait attraper à faire la fête avec ses amis au lieu d’étudier. Comme punition, son père l’a envoyé travailler chez des producteurs de chicons voisins pendant ses congés. Une fois les congés terminés, il a décidé que c’était ce qu’il voulait faire.

HE : Tine, depuis combien de temps es-tu active au sein de l’entreprise ?
Tine : Techniquement, je travaille ici depuis toute petite. Je me rappelle que je devais terminer une certaine corvée à la ferme avant de pouvoir monter le poney.  Participer à la vie de ferme fait partie de la vie d’un enfant d’agriculteurs. A l’époque, c’était une punition mais aujourd’hui, je suis reconnaissante.

J’ai d’abord voulu obtenir un diplôme avant de décider si je voulais continuer à la ferme familiale. Au final, j’en ai obtenu deux : j’ai un diplôme d’institutrice en économie et géographie, et un autre dans la gestion sportive. Après mes études, je me suis de plus en plus impliquée dans l’entreprise. A côté de cela, je suis amazone semi-professionnelle et mes chevaux sont un vrai travail à temps plein. Le choix de travailler à la maison, où j’ai mes chevaux, fait que mes deux carrières sont plus faciles à combiner. Cela fait maintenant six ans que je travaille à l’entreprise en tant qu’indépendante.

HE : Quelles sont vos tâches respectives ?
K : Je me charge principalement de l’emballage, du contrôle de qualité et de l’administration du service personnel.  « La finition », si vous voulez.
T : Je me charge également de l’administration, mais aussi de la Dimona et de la comptabilité. De plus, je prête main-forte sur le terrain en tant que chauffeur au champ et pour les transports vers la criée. Sam (le frère de Tine, red.) et papa s’occupent principalement du travail sur le champ et de la culture des racines, mais eux aussi ont leurs responsabilités administratives.

HE : Karin, parle-nous d’un moment mémorable qui a marqué ta carrière.  Y’a-t’il eu des moments difficiles ?
K : Ma participation au programme télévisé « Komen Eten » (« Un diner presque parfait », red.) a été une très belle expérience. En plus du plaisir de la participation, je suis heureuse d’avoir reçu l’opportunité de parler de notre métier à la télé et de montrer au public ce qui se passe vraiment à la ferme. Ce qui m’amène au côté un peu amer de notre profession : cela me rend tellement triste que nous, agriculteur, devons sans cesse nous défendre.

Avec la crise du coronavirus, je remarque que certains citoyens applaudissent pour les agriculteurs en remerciement pour la production de nourriture. C’est très bien, mais sans vouloir paraître ingrate, j’espère sincèrement qu’ils ne l’oublieront pas après cette crise. Pourquoi les agriculteurs produiraient-ils de la nourriture mauvaise ou dangereux ? Quel intérêt avons-nous à détruire le sol et la nature, dont nous dépendons tellement pour générer notre revenu ? C’est quelque chose qui me touche profondément.

T : Il est tout de même surréel qu’il y a ceux qui prétendent que nous empoisonnons le sol, si l’on sait combien d’analyses du sol, de tests et de considération précédent justement le travail du sol. C’est ahurissant, et c’est pour cela que c’est une bonne chose que maman a pu en parler à la télé.  Espérons qu’elle a ainsi pu sensibiliser quelques personnes à écouter les agriculteurs.

HE : Tine, quelles sont tes ambitions ?
T : Mon ambition est de continuer l’œuvre de mes parents aux mieux en collaboration avec Sam, de pouvoir délivrer un beau produit et d’être fière de notre travail.

HE : Karin et Tine, comment voyez-vous le rôle de la femme dans l’agriculture ?

K : Avant, il était limité à aider et aux tâches ménagères ou à préparer les repas pour les travailleurs au champ. Je remarque que cela a fortement évolué. De plus en plus, les femmes font partie intégrante des la vie d’entreprise et deviennent les égales des hommes. Cela se remarque très bien chez nous : ici, chacun(e) a ses responsabilités et celles-ci sont réparties de manière équitable. Tine conduit les tracteurs, et Sam aide dans son ménage.

T : Je pense en effet qu’on est sorti de l’idée du rôle classique de la femme à la ferme.  Loin d’être simplement une présence discrète qui se limite au ménage, la femme est désormais bien présente sur le champ et prends activement part dans les décisions concernant l’entreprise. Il y a d’ailleurs plus qu’assez d’exemples de femmes qui gèrent, seules, une ferme. La réaction de certaines personnes quand ils me voient au volant d’un tracteur est amusante, mais elles devront s’y faire !

 

Texte : Kim Schoukens
Images : Antoon Vanderstraeten
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